Je vous propose un résumé de l’article Construire une machine à innover en 90 jours paru dans l’édition d'août/septembre du Harvard Business Review.
Les auteurs Scott D. Anthony, David S. Duncan et Pontus M.A. Siren décrivent le concept de « Système d’Innovation Minimum Viable (SIMV) » qui en 90 jours pose, au sein d’une entreprise, les fondements d’une fonction d’innovation.
Pour beaucoup d’entreprises, l’innovation est loin d’être un processus maîtrisé. Bien au contraire, elle relève souvent d’initiatives individuelles voir même d’un coup de chance.
A l’opposé, la création d’un centre d’innovation à part entière implique de lourds investissements financiers et en ressources (exemple : l’usine à innovations de Procter & Gamble).
La mise en œuvre d’un « Système d’Innovation Minimum Viable (SIMV) » représente un premier pas vers une fonction d’innovation organisée. Porté par le Responsable de l’innovation de l’entreprise, cet outil est actionnable en quatre étapes et en seulement 90 jours.
Jours 1 à 30
La première étape du SIMV repose sur la définition des « bassins d’innovation » de l’entreprise. Il s’agit de ventiler les innovations dans deux catégories :
- « Innovations du cœur de métier » : celles qui permettent le développement de l’activité principale de l’entreprise (exemple : des améliorations de l’offre existante). Les projets sont gérés par la structure existante.
- « Innovations des nouveaux axes de croissance » : celles qui créent de nouveaux axes de croissance en dehors de l’activité principale de l’entreprise (exemple : la création de nouveaux produits). Le SIMV s’applique à cette dernière.
La deuxième catégorie d’innovations représente pour l’entreprise le moyen de combler l’écart entre son objectif de croissance et sa croissance réelle.
Durant cette première étape, deux semaines seront consacrées à l’évaluation de cet écart sur les cinq prochaines années. Ainsi plus l’écart est important, plus il faudra concentrer les efforts sur les « innovations des nouveaux axes de croissance ».
Jours 20 à 50
Durant trois semaines, il s’agit d’identifier les opportunités stratégiques qui vont permettre de réduire l’écart de croissance estimé.
Pour cela, il est conseillé de procéder à des sondages auprès des clients afin de collecter des besoins non satisfaits ou encore d’identifier de nouvelles initiatives en interne.
La Direction devra alors sélectionner en une demi-journée deux ou trois opportunités en fonction des critères suivants :
- C’est un besoin client non satisfait, non adressé.
- La réponse au besoin client peut être améliorée par la technologie ou proposée à un prix plus compétitif.
- L’entreprise possède une compétence clé que les concurrents n’ont pas.
Le scoring permet d’écarter les fausses bonnes opportunités (exemple : entrer sur un marché où l’entreprise n’a pas d’atout).
Ce sont ces opportunités qui seront approfondies au cours des prochaines étapes.
Jours 20 à 70
Il est maintenant temps de monter une équipe dédiée au développement des innovations. Cette équipe de taille réduite (trois personnes) doit être capable d’approfondir deux idées en parallèle. Ainsi, si une idée est abandonnée l’équipe pourra toujours poursuivre l’autre.
A ce stade de la démarche, il se peut que vous soyez confronté à un manque de ressource et/ou un manque de compétence.
Dans le premier cas, il est possible de faire la chasse aux chantiers d’innovation en doublons, au sur-staffing ou encore aux projets peu ROIstes mais gourmands en ressources. L’audit du portefeuille projets permettra de mettre en lumière ces gaspillages et de ré-allouer les ressources à l’équipe d’innovation. Cette initiative doit être poussée par la Direction.
Si votre équipe est novice, il est conseillé de rédiger une « check-list » de bonnes pratiques à partir d’ouvrages de référence sur l’innovation. Cette dernière permettra à l’équipe de se poser les bonnes questions au fur et à mesure de son avancement et ainsi d’encadrer la montée en compétence.
Jours 45 à 90
L’équipe de développement doit être supervisée par quelques cadres dirigeants impliqués. Ces derniers arbitreront certaines décisions (GO/NO GO) et s’attacheront à promouvoir les projets d’innovations au sein de l’organisation traditionnelle.
Afin d’assurer la bonne supervision des projets :
- au moins un membre du conseil devra être profondément convaincu par un projet afin d’assurer sa défense lors du GO/NO GO.
- L’équipe sera autonome dans l’engagement de dépenses jusqu’à une certaine limite définie par le conseil.
- Le conseil doit avoir la capacité de se réunir en moins de 36 heures.
Au bout de ces 90 jours, le potentiel de certains des projets commencera à émerger.
Déployer le système
Il s’agit ensuite d’étendre la pratique du SIMV à l’organisation au global. Voici plusieurs pistes de développement :
- Formaliser et intégrer dans les workflows existants certains aspects du SIMV qui ont bien fonctionné.
- Créer des équipes dédiées à un pan du SIMV (exemple : une cellule d’étude de marché).
- Apporter des solutions à long terme aux obstacles rencontrés lors de la mise en place du système.
Conclusion
Les auteurs terminent sur trois conseils à retenir :
- Le SIMV doit être appliqué à la lettre et de A à Z.
- Il doit y avoir une volonté forte d’innover de la part de la Direction.
- Les échecs sont sources d’apprentissage.
Quelques ouvrages de référence sur l’innovation :
- The Lean Startup, Eric Ries
- The Innovator’s Solution, Clayton M.Christensen et Michael E. Raynor
- Where Goog ideas Come From, Steven Johnson
- Business Model Generation, Alexander Osterwalder et Yves Pigneur