5 pratiques issues du Product Management pour mieux exploiter vos données

  • mise à jour : 18 novembre 2024
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Dans un environnement où les données sont omniprésentes mais souvent sous-exploitées, une bonne infrastructure ne suffit pas. Il faut transformer la culture et l’organisation pour en faire des leviers de croissance. Appliquer les principes du Product Management à la gestion des données est essentiel pour rendre ces dernières exploitables. Découvrez dans cet article 5 pratiques clés pour obtenir des données de qualité, avec des retours d’expérience de chez Google notamment. 

"Les données, c’est le nouveau pétrole mais seulement si elles sont raffinées." Le mathématicien Clive Humby avait parfaitement anticipé l’enjeu central auquel sont confrontées les entreprises aujourd'hui : malgré des investissements considérables dans leurs infrastructures de données, beaucoup d'organisations peinent à tirer une réelle valeur des informations récoltées. Nombre d’entre elles s’articulent autour d’une équipe centralisée, responsable de l’acquisition, la transformation et la distribution des données. Mais cette approche atteint vite ses limites dès que l’entreprise commence à se développer. L’équipe centrale ne peut plus répondre assez rapidement à toutes les demandes, et souvent, les données ayant été collectées sans réflexion préalable, finissent perdues dans un Data Lake, espace de stockage où l’on centralise toutes sortes de données brutes. 

Une alternative existe. Il est possible de donner plus d’autonomie aux équipes, les rendant responsables de la qualité et de la distribution des données qu’elles produisent, avec une vision centrée sur les utilisateurs dès la conception de la plateforme de données. En d’autres termes, il s’agit d’appliquer un principe de “data as a product”, et de traiter la donnée comme n’importe quel produit numérique. La mise en pratique de cette philosophie a un nom : le Data Mesh. Le passage à un modèle de Data Mesh est un changement culturel et organisationnel qui nécessite d'abandonner les approches centralisées créant des goulots d'étranglement, au profit d'une décentralisation qui responsabilise chaque équipe dans la gestion de ses propres données. 

Plus facile à dire qu’à faire, comme le souligne Kai Hansen, consultant chez Thiga : "C’est un vrai changement culturel que de céder le contrôle d’un actif perçu comme sensible, les données, à des équipes qui ne sont pas spécialisées dans ce domaine." Pour y parvenir, certaines pratiques du Product Management doivent être adoptées pour mettre toutes les chances de son côté. Au cours de nos différentes missions de conseil pour Thiga, nous en avons identifié cinq. 

#1 Responsabiliser les équipes au sein d'une organisation agile

En Product Management, structurer des équipes autonomes et agiles est une pratique essentielle pour maximiser l'efficacité et la rapidité d'exécution. Cette pratique permet de créer des équipes multidisciplinaires, capables de prendre des décisions et de s'adapter rapidement. Appliquée à la gestion de la data, cette approche encourage une organisation où chaque équipe est responsable de son domaine de données, assurant ainsi leur qualité et sécurité sans dépendre d’une entité centrale. Pour ce faire, les équipes data doivent être suffisamment petites pour garantir leur autonomie tout en intégrant les compétences nécessaires à leur indépendance. Antoine Guy, Principal Architect chez Google, rappelle que « les organisations centrales sont souvent très silotées parce qu’il est impossible d’avoir des équipes de centaines de personnes. Et le silo, c’est la mort de l'agilité. » À l’inverse, la décentralisation élimine les goulots d'étranglement et permet une gestion plus fluide. 

La donnée est pratiquement inutile seule. Elle n’a de valeur que lorsqu’elle est replacée dans le contexte d’un problème à résoudre

En adoptant cette organisation agile, les entreprises améliorent leur capacité à créer de la valeur rapidement et à s’adapter aux évolutions du marché. “Les entreprises ayant adopté cette approche peuvent implémenter des changements en quelques semaines, contrairement aux organisations plus centralisées qui nécessitent parfois plusieurs mois, assure Antoine Guy. Pour maximiser cette autonomie, chaque domaine doit disposer d'un Data Product Manager qui supervise la vision, la roadmap et la qualité des produits de données. Ce rôle garantit que les données sont exploitables et alignées sur les besoins des équipes IA, opérations, et d'autres équipes Produit.

#2 Penser aux utilisateurs dès la conception

La donnée brute a-t-elle vraiment de la valeur ? "Non”, assène Kai Hansen, consultant chez Thiga : “La donnée est pratiquement inutile seule. Elle n’a de valeur que lorsqu’elle est replacée dans le contexte d’un problème à résoudre”, rappelle-t-il. Beaucoup d’entreprises collectent des quantités massives de données, sans avoir réfléchi au besoin interne initial. Difficile alors de s’y retrouver lorsqu’il faut chercher des informations dans un immense Data Lake, souvent mal documenté… Sans compter que certaines données, essentielles, sont même parfois oubliées ! En Product Management, l’utilisateur du produit, interne ou externe à l'organisation, est mis au centre de la réflexion dès le départ. La même démarche doit être adoptée concernant la data. Les équipes en charge des données doivent donc se poser les bonnes questions, au bon moment : “Quel problème dois-je résoudre ?” ; “Pourquoi ai-je besoin de cette donnée ?” ; “À qui va-t-elle servir et dans quel but ?

Pour que les données génèrent réellement de la valeur, elles doivent être collectées et exploitées en fonction de besoins métiers clairement définis. Il est cependant crucial que les équipes ne se concentrent pas seulement sur leurs propres projets, sans alignement autour d'une stratégie globale, insiste Antoine Guy. Selon le Principal Architect de Google, “la valeur globale que nous recherchons n'est pas forcément égale à la somme des valeurs de chaque petite équipe. Si une équipe développe un service que personne n’utilise, cela n’apporte pas de valeur. Il faut une stratégie commune pour orienter les priorités de chaque équipe.” Ainsi, un alignement global évite les efforts fragmentés et les initiatives isolées. 

Pour aller plus loin, découvrez notre article La data : nouveau terrain de jeu des Product Managers

#3 Aligner les parties prenantes autour d’une stratégie commune

L’alignement des stakeholders autour d'une vision partagée est une pratique clé en Product Management. Côté data, cette approche demande une coordination entre les équipes, pour aligner les initiatives avec les priorités de l’entreprise et garantir un impact optimal. Cela implique de posséder des données de qualité, actualisées et faciles à interpréter. De cette manière, elles seront directement utilisables par les différents départements pour prendre des décisions éclairées. 

La gouvernance et les contrats de données jouent un rôle essentiel. D’un côté, la gouvernance assure que les standards de qualité, de sécurité et de cohérence sont appliqués à travers toute l’organisation, renforçant ainsi la confiance dans les données. De l’autre, les contrats de données définissent les rôles, les responsabilités et les critères de qualité entre équipes et établissent des attentes claires. Grâce à ces principes partagés, chaque équipe est en mesure de contribuer de façon cohérente aux objectifs de l'organisation, assurant ainsi que les données soient pleinement exploitables.
Concevoir une stratégie d'équipe alignée sur la stratégie globale ne suffit pas. Pour y parvenir, les équipes doivent être en mesure de prioriser les initiatives pour concentrer leurs efforts là où la valeur ajoutée est maximale et où elles contribuent le plus aux objectifs communs.

#4 Prioriser en fonction de l’impact et de la valeur business

Chaque initiative du Product Management est guidée par la volonté de maximiser la valeur business. Une bonne priorisation est ce qui permet de mettre les efforts sur les enjeux les plus stratégiques. Appliquée aux données, cette approche permet non seulement de choisir les projets à fort impact, mais aussi de déterminer les seuils optimaux d’utilisation des données : la priorisation aide à comprendre le niveau minimal requis pour rendre un ensemble de données exploitable et à éviter des améliorations coûteuses qui apporteraient peu de valeur ajoutée.

Savoir ajuster les priorités en fonction de l’évolution des besoins et du marché est tout aussi important que d’avoir une vision claire de la destination cible.

L'approche décentralisée du Data Mesh permet aux équipes métiers d’identifier et de prioriser les initiatives qui offrent un retour sur investissement maximal pour leurs activités, tout en réduisant la dépendance vis-à-vis des équipes centrales. Kai Hansen le résume bien, L'avantage du Data Mesh est que les équipes travaillent sur leurs propres données, qu'elles connaissent bien. Cela leur permet de mieux les analyser et de mieux les utiliser pour prendre des décisions.” 

En plus de permettre de prioriser les initiatives qui ont le meilleur Time-to-Value (TTV), le modèle Data Mesh garantit que chaque initiative “data” offre un retour sur investissement mesurable, renforçant ainsi la capacité des données à générer de la valeur tangible pour l’entreprise.

#5 Accueillir les changements

Attention : ne perdez pas de vue que l’adaptabilité au changement prime sur le suivi rigide d’un plan ! Savoir ajuster les priorités en fonction de l’évolution des besoins et du marché est tout aussi important que d’avoir une vision claire de la destination cible. En complément de l'organisation Agile des équipes, la plateforme de données elle-même doit être conçue pour s'adapter à l’imprévu.

Pour Kai Hansen, les équipes data gagneraient à accepter les imperfections et à construire des systèmes capables de s’adapter aux erreurs et aux imprévus : “L’enjeu est de trouver l’équilibre entre l’effort à fournir pour que la donnée soit parfaite et la valeur qu’on en tire. Beaucoup d’équipes data n’arrivent pas toujours à évaluer ce juste milieu, explique-t-il, avant d’insister sur le fait qu’une architecture Agile ne doit pas dépendre de données parfaites : Elles gagneraient à adopter une approche qui intègre l’erreur, avec des systèmes adaptables qui ne nécessitent pas de données impeccables pour fonctionner.”

Penser la donnée comme un produit nécessite une profonde évolution culturelle et technologique au sein des entreprises. En appliquant certaines pratiques propres au Product Management, les entreprises peuvent adopter une approche centrée utilisateur, permettant de maximiser la valeur extraite des données tout en répondant aux besoins réels des équipes et des clients. Les pratiques que nous avons illustrées ne doivent pas être considérées comme des éléments isolés, mais comme un ensemble intégré et cohérent.

Cette approche ne donne pas seulement la capacité de retirer de la valeur de la donnée : elle joue également un rôle essentiel dans le bien-être des équipes. Comme le souligne Kai Hansen, “les gens sont plus épanouis quand ils travaillent dans un environnement autonome, parce qu’ils se sentent plus proches de leur mission”. En plaçant l’autonomie au cœur des pratiques, on favorise un environnement de travail plus collaboratif, où les équipes peuvent se sentir davantage responsables de leurs missions. 

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